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« Les systèmes de protection ne sont pas infaillibles »

BellangerAnthony Bellanger est Secrétaire général adjoint de la Fédération internationale de journalistes (FIJ). Il a été journaliste pendant 18 ans en presse et en magazine. Il a également été à la tête du syndicat national des journalistes (SNJ).

Est-ce que le chiffrement est un moyen efficace de protection ?

Depuis les révélations d’Edward Snowden, on sait la facilité d’intercepter l’échange d’emails. Nous avons d’ailleurs organisé la vidéoconférence l’an dernier à Londres.

Aujourd’hui, il y a énormément d’outils pour sécuriser les emails, mais presque autant pour les déchiffrer. Il y a même des robots qui peuvent faire ça. Les systèmes de protection ne sont pas infaillibles. En fait, lorsqu’on chiffre un email, on s’expose, car cela éveille des soupçons. Pourquoi chiffre-t-il son message s’il n’a rien à cacher ?

Quels sont donc les moyens les plus efficaces ?

La meilleure façon de protéger nos sources et nos échanges, ça reste le contact direct. Le bon vieux journalisme à l’ancienne. Quitte à se donner rendez-vous posant un drapeau rouge à sa fenêtre (comme dans le film Les hommes du président). Ou revenir aux échanges par cabines téléphoniques. Ou même utiliser un pigeon, si vous lui faites confiance…Les outils, c’est donc les rendez-vous directs, si possible. Et peu de prise de notes.

Le chiffrement est donc inutile ?

Le chiffrement est seulement une manière de retarder l’inévitable. Il y a toujours un moyen, tôt ou tard, de déchiffrer nos messages. D’autant plus que les serveurs sont connus. Google, Hotmail, Yahoo. Nous-mêmes, nous nous sommes fait pirater notre site internet par des hackers irakiens et de Cisjordanie.

Et même si on a porté plainte, en l’occurrence à Bruxelles, cela n’a pas abouti, car c’est au pays d’où a été lancée l’attaque d’agir. Dans les faits cela prends du temps, ou n’aboutit à rien. Eux pour le coup sont introuvables car ils créent des adresses fictives. On a eu toutes les peines pour être entendus par la justice.

Que devraient faire les journalistes pour se protéger ?

Si je dois donner un conseil aux confrères : utilisez des emails qui ne ressemblent à rien. Des serveurs qui n’attirent pas l’attention. Évitez donc Yahoo, Google. Le réseau Tor, par exemple, est un bon moyen quoiqu’il devient désormais obsolète car connu et reconnu. Il faut surtout savoir que rien n’est infaillible aujourd’hui. On peut tôt ou tard faire sauter les verrous. Même un mot de passe avec une suite de lettres, de chiffres sans cohérence peut être déchiffré.

 

Propos recueillis par Juan Palencia et Matti Faye

 

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